Un salarié peut-il prendre acte de la rupture de son contrat s’il est victime de harcèlement sur son lieu de travail ? Et quels sont les conséquences d’un tel acte ? Ces questions se sont posées à l’occasion de la prise d’acte exercée par une salariée qui était victime de harcèlement sexuel et moral de la part de son chef d’équipe, puis de harcèlement moral parce qu’elle a porté les faits à la connaissance de l’entreprise. La Cour d’appel de Reims a débouté la salariée de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail et à un harcèlement. Elle a considéré que la prise d'acte produisait les effets d'une démission aux motifs que la société avait pris les mesures appropriées pour protéger la salariée qui en était victime et sanctionner son supérieur hiérarchique de sorte qu'elle n'avait pas manqué à son obligation de sécurité. La Cour de Cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel au motif que : « l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, manque à cette obligation lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail de violences physiques ou morales, exercées par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures pour faire cesser ces agissements ». Donc on en déduit que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail lorsque le salarié est victime de harcèlement sur son lieu de travail est possible. Elle ne s’analyse pas en une démission mais plutôt en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. En effet, le harcèlement au travail est un acte grave. L’employeur dont le salarié est victime de harcèlement est considéré comme avoir gravement manqué à son obligation de résultat. Peu importe qu’il ait fait cesser le harcèlement, il aurait dû l’éviter. Dans le cas d’espèce, lorsque l’employeur est intervenu pour faire cesser le harcèlement, les dommages notamment sur la santé de la salariée s’étaient déjà réalisés. On considère donc que l’employeur n’a pas su prévenir, éviter et combattre les risques à la source comme cela est prévu par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail. Dans ce cas la prise d’acte est justifiée et ne peut pas être considérée comme une démission. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 mars 2015, pourvoi n° 13-18.603, Publié au bulletin).