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  • Le contexte familial peut être pris en compte pour apprécier l’intérêt de l’enfant

    Peut-on refuser à un enfant d’adjoindre le nom de son père au nom de sa mère si le père se désintéresse de lui ? C’est à cette question que la Cour de Cassation a apporté une réponse très nette. En effet, une mère a assigné le père biologique de son enfant en établissement du lien de filiation à l’égard de l’enfant. L’expertise biologique lui a permis d’avoir gain de cause, sauf sur l’adjonction du nom du père à celui de la mère. Le Tribunal de première instance a estimé que le père se désintéressant de l’enfant, il n’y avait pas lieu de faire droit à la demande tendant à adjoindre son nom à celui du père. La Cour d’appel est allée dans le même sens. Elle a relevé que « le nom n'avait pas d'incidence sur le lien de filiation, qui était judiciairement établi et n'était plus contesté et qu'accoler au nom de la mère celui d'un père qui n'entendait pas s'impliquer dans la vie de l'enfant et s'intéresser à lui risquait de confronter en permanence ce dernier au rejet dont il était l'objet de la part de son père. ». La mère a intenté un pourvoi en cassation qui a été rejeté par la Haute Cour qui a affirmé que : « la cour d'appel a souverainement estimé qu'au regard du contexte familial, il n'était pas de l'intérêt de l'enfant de porter le nom de son père ». Cette position de la Cour de Cassation permet de répondre à la question posée au début de cette note. Oui, on peut refuser à un enfant d’adjoindre le nom de son père au nom de sa mère si le père se désintéresse de lui. Dans ce cas précis, on ne porte pas atteinte au principe de l’intérêt supérieur de l’enfant tel que prévu par les normes juridiques applicables.

    Cet arrêt important car il fait émerger le contexte familial comme un élément à prendre en compte pour apprécier l’intérêt d’un enfant. En effet, il est convenu que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions le concernant. Mais, où commence et où s’arrête l’intérêt supérieur de l’enfant ? Jusque-là pour apprécier l’intérêt de l’enfant, on prenait en compte un ensemble de normes relevant soit du droit interne soit du droit international. Le contexte familial était également pris en compte mais à l’aune de ce qui peut être intégré dans les articles 3, 7 et 8 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 à savoir : le droit à un nom, le droit d'acquérir une nationalité, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux, le droit de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales. De ce fait, le contexte familial n’était pas un critère autonome d’appréciation de l’intérêt de l’enfant. Et pour ce qui est de l’adjonction du nom du père à celui de la mère, avant la décision faisant l’objet de cette note, il n’y a jamais eu de décision aussi tranchée fondée sur le contexte familial. Désormais, le contexte familial peut-être pris en compte en tant que critère distinctif pour apprécier l’intérêt de l’enfant à la jouissance de tous les droits dont il est titulaire. En l’espèce, le contexte familial était assez particulier. Le père n'entendait pas exercer l'autorité parentale ni exercer un droit de visite et d'hébergement. Il n'entendait pas non plus s'impliquer dans la vie de l'enfant. Bref, il était indifférent à l’égard d’un enfant qu’il n’avait même pas reconnu. Et c’est pour cela que l’enfant n’avait aucun intérêt à adjoindre son nom à celui de sa mère. Autrement dit, l’enfant a le droit de porter le nom de ses deux parents mais pas à n’importe quel prix. Il conviendra dès lors de prendre en compte le contexte familial pour apprécier de manière optimale l’intérêt de l’enfant.

    Néanmoins, le critère du contexte familial ne sera pas un critère absolu. Puisqu’il consiste à prendre en compte le comportement du père, son implication et sa volonté, il s’appliquera in concreto pour ne pas porter atteinte aux articles 3, 7 et 8 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989. (Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 11 mai 2016, pourvoi n° 15-17.185, Publié au bulletin)

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